« Toutes les deux secondes, une fille mineure est mariée. Nous pouvons changer cela.
Ensemble, mettons fin au mariage des enfants ! »
David à la station radio
Pourquoi avez-vous choisi de sensibiliser la communauté à la question du mariage des enfants à travers la radio ?
Avez-vous des stratégies pour sensibiliser les hommes à cette question ?
Nous organisons souvent des émissions participatives et des débats ; nous proposons des sujets auxquels hommes et femmes participent et interviennent en direct par appel ou SMS. Nous nous rendons également régulièrement sur le terrain, dans les villages, pour rencontrer les hommes dans leur maison et les interviewer. Dans le passé, il était assez difficile de réunir hommes et femmes pour discuter des questions de genre. Aujourd’hui, nous parvenons à mobiliser des interlocuteurs et à mettre en contact des hommes, des femmes, des parents et des jeunes gens qui s’intéressent tous à la lutte contre le mariage des enfants. Nous produisons et diffusons des émissions et des spots pour faire passer le message et sensibiliser la communauté à l’égalité entre hommes et femmes et, surtout, nous montrons aux hommes que les femmes ont les mêmes droits qu’eux.
Auparavant, la société considérait que la place des femmes était en cuisine ou aux champs et qu’elles ne devaient pas donner leur avis ni se mêler des affaires réservées aux hommes ; cette mentalité n’est plus systématique mais elle existe encore aujourd’hui. C’est pour cela que nous avons lancé cette campagne, pour emmener plus loin le travail déjà accompli et engager plus d’hommes à accepter l’idée selon laquelle la place d’une fille âgée de 15 à 17 ans n’est pas au foyer mais à l’école. Voilà la vision qui nous motive chaque jour.
Un journaliste de « Radio Ondese » réalisant une interview
Qui invitez-vous à participer à vos débats et émissions publiques ?
En ce qui concerne les débats, nous nous déplaçons dans les villages alentours et invitons les leaders de la communauté, les chefs locaux ainsi que des femmes leaders à participer aux émissions. Ces émissions sont très appréciées des auditeurs car elles touchent les réalités locales et permettent aux gens de prendre la parole librement. Même les jeunes filles intimidées par les interdictions de leurs parents arrivent à s’exprimer et participent aux débats.
Lors des émissions participatives, nous invitons des experts (femmes leaders maîtrisant bien le sujet, juristes, autorités locales ou politico-administratives…) et les auditeurs peuvent ainsi interagir avec eux en direct par SMS ou en appelant l’antenne. Chaque semaine, nous produisons au moins cinq émissions sur le sujet, en plus de spots d’une ou deux minutes diffusés quotidiennement, pour sensibiliser la communauté ou interpeller les parents, et faire comprendre que marier une fille avant 18 ans est punissable par la loi.
Nous rencontrons parfois quelques soucis, surtout quand nous allons dans les villages au sein desquels les chefs et les coutumes affirment que les filles doivent se marier avant 18 ans. Nous sommes alors obligés d’amener sur place des hommes politiques et des juristes, parfois même des pasteurs, pour nous aider à faire comprendre à ces chefs que leurs pratiques sont néfastes. Vous comprenez bien que le travail n’est pas facile. Parfois, nous recevons même des menaces mais quand nous voyons une fille de 12 ans déjà mariée ou une autre de 15 ans mère de trois enfants, nous savons pourquoi nous devons continuer.
Avez-vous d’autres activités de sensibilisation relatives aux mariages des enfants au sein des communautés locales ?
En plus des émissions de radio, nous organisons des ateliers de formation destinés aux leaders des communautés et avons aussi créé des clubs d’écoute. Les ateliers nous permettent de renforcer l’effet de nos émissions, d’entendre les retours des auditeurs sur ce qu’ils ont appris à la radio et de les aider à mieux comprendre la problématique. Ces ateliers sont participatifs et permettent d’échanger sur la situation avec des experts et des jeunes femmes victimes de mariage précoce.
Les clubs d’écoute sont des groupes de discussion dédiés aux femmes et filles qui ont été victimes de cette pratique. Ces cercles de parole sont l’occasion de parler entre elles de leurs difficultés et de se soutenir au quotidien. Nous les formons et les encadrons sur différents sujets en leur expliquant qu’elles peuvent reprendre leur vie en main, aller de l’avant et se reconstruire. A travers les ateliers et clubs d’écoute, nous essayons de les accompagner dans ce processus de reconstruction psychologique.
Quels retours avez-vous eus de la part des filles et des femmes qui participent à vos activités ?
Nous recevons beaucoup de témoignages de leur part. Certaines jeunes filles dépensent même leurs crédits téléphoniques pour appeler la radio et dire combien elles bénéficient de nos activités ! C’est ce qui nous donne la force et le courage nécessaires pour avancer et nous prouve l’impact réel de notre travail au sein de la communauté.
La radio est l’un des moyens incontournables et des plus efficaces pour aider les jeunes femmes à revendiquer et faire valoir leurs droits dans l’est de la RDC, une région marquée par la guerre et les violences récurrentes. Nous espérons un jour pouvoir leur dire que cette pratique est révolue et qu’elles sont libres d’aller à l’école. Chaque don représente une contribution importante qui permet d’améliorer la vie d’une jeune fille. Une vie de plus qui peut être sauvée dans cette région.
Découvrez comment vous pouvez soutenir ce projet ici : Des émissions radio pour sensibiliser au mariage des enfants au Sud-Kivu (RDC)
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